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Projet de décret de protection de caribou : 7e lettre à Justin Trudeau, Premier Ministre du Canada



Sacré-Coeur, le 15 août 2024,


Monsieur le Premier Ministre,

 

Votre gouvernement continue de faire la sourde oreille aux multiples cris du cœur lancés par nos travailleurs, nos citoyens et nos communautés. Serait-ce trop demandé que de porter une attention, fusse-t-elle minimale, à notre situation ?

 

Pour reprendre le terme utilisé par votre Ministère de l’environnement, les humains de notre milieu font face à une « MENACE IMMINENTE », celle du décret préparé par Monsieur Guilbeault. Et pour nous, la menace est à nos portes… Elle ne risque pas en effet de « peut-être » arriver dans 10 ans, comme cela est suggéré pour les caribous présents dans le secteur Pipmuacan. Pour nous, la menace risque de se concrétiser dans les prochains mois et ses effets se font d’ailleurs déjà sentir…


Votre Ministre de l’environnement et la vague de disciples-militants qui le suit se font un devoir de minimiser les impacts pour notre milieu en parlant de « campagne de peur », « de ne pas pouvoir faire des omelettes sans casser des œufs » et de la nécessité de nous « requalifier pour pouvoir faire autre chose ». Cet aveuglement militant et cette intransigeance ne traduisent rien d’autre que du mépris envers nos communautés. Ces personnes méconnaissent totalement notre réalité, ainsi que les enjeux qui menacent de bouleverser l’ensemble de nos vies. Cela est tout simplement irrespectueux, insensible et inhumain. Chose certaine, ce n’est pas leur vie, ni même celle de leur famille, qui risque d’être anéantie.


Ces dernières semaines, nous avons eu l’occasion d’aller à la rencontre des gens de notre milieu : des travailleurs, des entrepreneurs, des citoyens... Certains d’entre eux ont eu l’opportunité de s’exprimer dans les médias et le constat est sans appel : les gens vivent dans l’angoisse et l’incertitude. Certaines personnes ont même confié ne plus trouver le sommeil et sont paralysées face aux possibles conséquences du décret sur leur vie. C’est très concret M. le Premier Ministre, des femmes et des hommes mettent leurs projets de vie sur pause, sans savoir s’ils vont pouvoir les concrétiser.


La Haute-Côte-Nord n’a aucunement le luxe de subir une telle situation car elle figure déjà dans le peloton de tête du triste classement des MRC les plus dévitalisées du Québec.

Il n’y a rien de pire qu’une société qui se fige et qui arrête de prendre des initiatives. La Haute-Côte-Nord n’a aucunement le luxe de subir une telle situation car elle figure déjà dans le peloton de tête du triste classement des MRC les plus dévitalisées du Québec.


Il est légitime que notre société se soucie de la préservation de l’écotype « forestier » de la sous-espèce de caribou qui est présente au Québec. Cela ne peut cependant se faire à n’importe quel prix. Il est et sera toujours inacceptable de sacrifier des milliers de travailleurs et citoyens qui ont à cœur de gagner dignement leur vie, faire vivre leur famille et assurer la vitalité de leur milieu. Des solutions sans impacts existent, pourvu que l’on réussisse à aller au-delà d’une vision unilatérale qui ne considère aucunement les impacts sur les humains.


Pour y parvenir, il est impératif d’adopter une démarche pluridimensionnelle et nous avons un outil formidable pour cela : le développement durable.


Le décret de M. Guilbeault contrevient aux principes du développement durable tels que fixés par l’ONU. Les objectifs du programme 2030 de l’ONU se focalisent sur cinq grands thèmes : la dignité humaine, la stabilité régionale et mondiale, une planète saine, des sociétés résilientes et des économies prospères. Comme nous l’avons déjà longuement démontré par l’entremise de nos six lettres précédentes, le projet de décret ne répond à aucun de ces cinq objectifs à l’échelle du Québec. Plus concrètement encore, l’objectif principal poursuivi par le décret, soit l’atteinte d’un taux de perturbation de 35% dans la zone provisoire, est inatteignable et nous en avons fait la démonstration dans notre précédente lettre.


Ce que le décret de M. Guilbeault provoque en revanche, c’est le ressentiment et la montée des tensions sociales dans notre milieu. Nos communautés ont déjà connu la misère et la pauvreté Monsieur le Premier Ministre. Entre 1982 et 1985, avant la création de Boisaco, un contexte de précarité sévissait en effet dans notre milieu. Les citoyens ont cependant toujours gardé espoir, ils ont fait preuve de détermination et ils se sont retroussés les manches. Ils ont aussi et surtout fait preuve d’une extraordinaire mobilisation qui a fait la différence et permis la création de Boisaco. Cette mobilisation est encore et toujours bien vivante et soyez certain que nous sommes prêts à aller jusqu’au bout… Nous n’avons en effet rien à perdre, car nos vies sont menacées d’être bouleversées de manière irréversible.


Il est urgent que votre gouvernement assume sa responsabilité de maintenir la paix sociale relativement à ce dossier, en laissant la société québécoise poursuivre son travail de façon intelligente et concertée. Êtes-vous conscient que l’attitude de Monsieur Guilbeault contribue à polariser et radicaliser les positions de nombreuses personnes ? Ce projet de décret a en effet engendré un durcissement des positions relativement à ce dossier, entraînant par voie de conséquence une détérioration des relations entre les autochtones et non-autochtones. Cela est tout simplement inconcevable et votre gouvernent doit réagir. Nous ne pouvons accepter que cela perdure encore pendant des mois. Nous vous demandons donc de renoncer à ce projet de décret sans délai et sans conditions.


Steeve St-Gelais                              André Gilbert ing.f.

Président                                            Directeur général

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